Jeu d’énigmes au coeur du Parc de La Villette
Partez à la recherche des trésors disparus de Ramsès II
Le visiteur est accueilli par une photo de la façade d’Abou Simbel de 7 mètres de haut. Puis il entre dans un sas où une vidéo introductive projetée sur écran courbe le met dans l’ambiance.
L’exposition est organisée en deux parties :
C’est un jeune homme d’environ 25 ans, issu d’une famille d’aristocrates militaires, mais, il n’est pas de sang royal. Quand il monte sur le trône, le système pharaonique existe depuis 2000 ans. La famille royale qui a fondé le Nouvel Empire, en 1550 avant J.-C., presque trois siècles plus tôt, s’est éteinte. Ses derniers représentants étaient Toutânkhamon, puis Aÿ. Faute d’héritier, le général en chef des armées égyptiennes, Horemheb, monte sur le trône vers 1319 avant J.-C. Ses généraux Parâmésousou et Séthy deviennent ses vizirs. À sa mort sans héritier en 1292 avant J.-C., le vizir Parâmésousou devient le roi Ramsès Ier. Son petit-fils, le futur Ramsès II a une bonne dizaine d’années. Alors qu’il était fils et petit-fils de généraux, aristocrate, mais tout de même simple être humain, il devient un prince, potentiellement divin. À cet âge, il est conscient de l’importance de son changement de nature. En 1290 avant J.-C., son père monte sur le trône. Désormais, adolescent, il est devenu fils de roi.
Les premières salles posent le décor : l’état de l’Égypte et ses relations avec ses voisins, la nature du roi et sa relation avec son entourage divin et son entourage terrestre.
Ramsès II sait qu’il doit prouver sa légitimité. Il faut qu’il agisse en tout de façon démesurée tout en respectant parfaitement les règles de conduite imposées au roi.
On rédige sa titulature composée de cinq noms qui annoncent sa politique : un guerrier, choisi par Rê (le soleil) lié fortement à Maât (la règle, la loi, la justice), aimé d’Amon (le roi des dieux), protecteur de l’Égypte, vainqueur de ses ennemis, aux années longues et puissantes. Tout ce qu’il annonce dès son sacre va se produire… en grande partie de son fait, mais aussi grâce à la providence.
Ramsès remploie les monuments des rois précédents et y ajoute son nom pour montrer qu’il est de même nature qu’eux. Ainsi, la première salle présente une tête de colosse royal et un obélisque « usurpés » à son nom.
Deux générations plus tôt, la frontière nord de l’empire égyptien a été enfoncée par un nouvel ennemi venu de Turquie : les Hittites. Ces derniers occupent la Béqâa, riche plaine située entre la chaîne du Liban et de l’Anti-Liban, ainsi que l’Amourrou, le sud de la côte de la Syrie actuelle. Ramsès veut récupérer ces territoires : ce sera la preuve que les dieux l’ont choisi. Dans la deuxième salle, nous évoquons cet état conflictuel et la nature guerrière du roi, par des carreaux de faïence siliceuse représentant des ennemis attachés, par un arc et un carquois (Audio 2), par un éclat de calcaire décoré de l’image du roi Ramsès IV sur son char, ainsi que d’éléments de décor de chars de guerre royaux de la fin de la XVIIIe dynastie.
Nous évoquons les dimensions colossales de ce dieu sur terre par une photographie murale de la deuxième cour de son « temple de millions d’années » à Thèbes, le Ramesséum. Cette cour est bordée de statues du roi de grandes dimensions. Sur cette photo, à droite, se trouve le colosse abattu dit « Osymandyas », qui s’élevait à moins de 20 mètres de haut. Il s’agit de la représentation de la nature surhumaine du roi. Le culte rendu à ces colosses gigantesques était une caractéristique du règne d’Amenhotep III, le grand-père de Toutânkhamon, qui est repris et développé par Ramsès II.
La nature divine du roi se manifeste aussi à travers le sphinx, image composite mi-homme mi-lion (Audio 4). Le sphinx de cette salle présente un grand récipient dont le couvercle est la tête du bélier d’Amon. Le roi est un dieu qui célèbre les rites et fait les offrandes pour les divinités.
Les deux vitrines suivantes précisent ce propos. Dans une petite vitrine est présentée de la vaisselle liturgique en or et en argent. Il s’y trouve une aiguière en or massif au nom d’Ahmosis, le fondateur du Nouvel Empire, trois siècles avant le règne de Ramsès. Il a été découvert à Tanis, ville fondée après l’époque ramesside.
Dans une grande vitrine murale (vitrine Audio 3), se trouvent des témoins de la relation entre le roi Ramsès et les divinités. Une stèle montrant une procession religieuse et une paroi de temple encadrent un magnifique brasero de cuivre pour holocauste. Ce dernier a été découvert à Tanis. Deux statuettes représentent le roi prosterné humblement présentant son offrande aux dieux. On pourrait croire que ces images expriment une idée contraire à celle des colosses. Pourtant, il s’agit bien de la preuve que Ramsès est un dieu fils des dieux, puisque cette humilité exprime sa piété filiale. De plus, son offrande constitue un rébus qui écrit son nom.
La vitrine de droite contient une statue du prince Khâemouaset, quatrième fils de Ramsès, fils de la grande épouse royale Isetnofret. Il est agenouillé présentant une chapelle contenant une image de Ptah-tatenen, dieu de la ville de Memphis.
Lorsqu’il monte sur le trône, Ramsès a déjà deux grandes épouses et quatre fils. Au cours de son règne, il en engendrera un nombre incroyable d’enfants. Nous lui connaissons environ 60 filles et 50 garçons. Au vu de la mortalité infantile en Égypte, il a dû en avoir beaucoup plus. C’est digne d’un dieu, c’est une preuve de sa légitimité. Khâemouaset est général, il participe à la prise de Dapour. Il est aussi prêtre-sem et grand-prêtre de Ptah (le dieu de Memphis), prêtre ritualiste et supérieur en chef, c’est-à-dire théologien et magicien. Il est connu pour ses recherches dans les monuments des anciens rois. Il dirige les fêtes jubilaires de son père. Après la mort de son frère aîné, Khâemouset devient prince héritier. Il meurt vers 60 ans, ce qui est âgé pour l’époque, mais pas assez pour survivre à son père. Après sa mort, il entre dans la légende comme théologien et magicien.
La vitrine de gauche contient une statue datant originellement de la XVIIIe dynastie. L’inscription qui la couvrait a été effacée et remplacée par celle du vizir Paser. Toute la partie avant de la statue a été retaillée en forme de façade de chapelle contenant des effigies divines en métal précieux. On lui a ajouté des oreilles pour que Paser entende les prières adressées par les fidèles. Les contemporains devaient savoir qui était le haut fonctionnaire dont Paser « usurpait » la statue. Ces transformations véhiculaient le message selon lequel Paser était l’actualisation de cet ancien personnage. Paser est vizir pendant la première moitié du règne de Ramsès II. Il joue un rôle considérable lors du traité de paix avec les Hittites. Il finit sa carrière comme grand-prêtre d’Amon.
Maintenant que le décor est planté, nous abordons les deux périodes du règne de Ramsès II : la guerre puis la paix.
Nous l’évoquons à travers l’événement phare du règne : la bataille de Qadech. Il s’agit d’une part d’une victoire stratégique de Mouwatalli, le roi des Hittites qui a fait tomber Ramsès dans un piège. En effet, Mouwatalli a fait croire à Ramsès qu’il avait peur et qu’il avait battu en retraite jusque dans le nord de la Syrie. Ramsès ne s’est pas méfié et campait près de Qadech lorsque les Hittites l’ont attaqué par surprise. Cependant, Mouwatalli n’avait pas vu la forte avant-garde égyptienne que Ramsès avait placée au nord pour surveiller la route de la côte méditerranéenne. Alerté, ce corps d’armée d’élite s’est précipité dans le dos des Hittites occupés à piller le campement égyptien. Mouwatalli était tombé dans son propre piège, ce qui, aux yeux des Égyptiens, était la preuve d’une punition divine. Dans la nuit, l’ensemble de l’armée égyptienne avait rejoint Ramsès au pris d’une marche forcée prodigieuse. Au matin, elle était toute entière en ordre de bataille face aux armées hittites. Ainsi, Mouwatalli perdait la face tandis que Ramsès gardait la tête haute.
Cette période de guerre est figurée par deux magnifiques reliefs provenant de la tombe du général Yourkhy découverte à Saqqara en 2018. Leur style est caractéristique de la période dite post-amarnienne. Datant certainement du règne de Séthy Ier, ils sont présentés de part et d’autre d’un bloc provenant d’un temple décoré en relief dans le creux peint polychrome qui représente Ramsès tenant trois ennemis par les cheveux.
Nous montrons enfin un gabarit en pierre utilisé par les artisans pour fabriquer des boucliers de type méditerranéen oriental, que l’on voit dans les mains des Hittites sur les reliefs égyptiens. Ce gabarit provient des usines égyptiennes. Il prouve que certaines de leurs troupes utilisaient aussi de l’armement d’origine étrangère.
Ramsès a su faire la paix avec l’Empire hittite. Les deux parties ont signé un traité d’alliance, le roi d’Égypte épouse des princesses hittites, à la suite de quoi la Méditerranée orientale connaît un demi-siècle sans conflit. Ainsi Ramsès II reproduit avec les Hittites ce qu’Amenhotep III avait obtenu avec les Mitanniens. Ramsès est béni des dieux car toutes les routes commerciales sont ouvertes depuis l’Angleterre jusqu’au Pakistan. Ces échanges libres causent une richesse comparable à celle du règne d’Amenhotep III, mais sur une durée beaucoup plus longue.
Dans cette grande salle, deux aspects résultant de cette abondance sont développés : l’importance des dames du palais et leur vie luxueuse, ainsi que la politique de constructions inégalées caractéristiques du règne de Ramsès.
La mère du roi, Touy, est représentée trônant (Audio 8). Il s’agit de la statue d’une reine de la fin du Moyen Empire qui a été remise au goût ramesside en allongeant sa perruque et en la couvrant d’un vêtement plissé. Nous savons que c’est Touy en raison des inscriptions hiéroglyphiques profondément creusées à la surface du trône et sur le pilier dorsal. Le temps passant, cette statue de la mère de Ramsès est devenue tellement sacrée qu’on lui a raboté le sommet du crâne pour y ajouter une couronne en métal précieux, et qu’on a aménagé l’arrière de ses bras et le côté de ses mains pour la doter d’une table d’offrandes en métal précieux.
En Égypte pharaonique la reine-mère a toujours eu une importance capitale puisqu’elle est la garante de la légitimité de sa descendance. La grande épouse du roi, mère du prince héritier est une personnalité de premier plan. Au Nouvel Empire, l’étendue du pouvoir de ces reines s’accroît encore. Leurs images se multiplient, gagnent en importance, en dimensions, comme en témoigne le temple d’Abou Simbel, dont la maquette occupe le fond cette salle (Audio 7). Nous savons par les échanges épistolaires avec diverses cours royales que leur pouvoir diplomatique est réel.
Les vitrines de cette salle contiennent de nombreux objets de luxes de diverses époques en matériaux tous plus précieux les uns que les autres qui reflètent la richesse des dames du palais et le raffinement de leur existence. Le visiteur doit noter en particulier le miroir ayant appartenu à la reine Sathathoriounet, probablement le plus beau jamais trouvé en Égypte. Il est en argent, le manche en or et électrum, incrusté d’obsidienne, de cornaline et de lapis-lazuli, à l’effigie d’Hathor, fille et épouse de Rê, déesse de l’amour, de la musique, des parfums…
La politique architecturale de Ramsès II est particulièrement intense. La construction des temples est évoquée par la vitrine qui présente des modèles de colonnes de pierre datant de la fin de l’histoire pharaonique et d’une grande queue d’aronde au nom de Séthy Ier. Elle est illustrée par la maquette moderne des deux temples rupestres d’Abou Simbel, celui du sud dédié au Soleil levant Rê-Hor-akhty et à Ramsès II (Audio 6), celui du nord dédié à Hathor (déesse de l’amour) et à Néfertary (Audio 7). Ces temples étaient ornés de nombreuses statues, comme celle du roi tenant le sceptre-héqa (Audio 5)
Ramsès II a fondé une ville royale d’une richesse inégalée dont le souvenir perdurera au-delà de l’époque pharaonique : Pi-Ramsès, littéralement : « Maison de Ramsès ». Elle est évoquée par un petit film et la vitrine (Audio 9) présentant les plaques de faïence siliceuse qui ornaient les palais de la ville.
Pi-Ramsès joue un rôle politique, administratif, économique. Il s’y trouve des palais, des temples, des centres de production de toutes sortes. C’est aussi un port commercial et militaire placé sur une branche du Nil qui donne accès à la fois au sud du pays et à la Méditerranée. Le temps passant, ce port s’envase. À la fin du Nouvel Empire, cette branche du Nil s’est comblée. Au début du premier millénaire avant J.-C., il faut se rendre à l’évidence, la capitale doit être déplacée. On choisi un lieu propice sur la branche tanitique du Nil, à une vingtaine de kilomètres au nord de Pi-Ramsès. Ce sera la ville de Tanis. Puisque les premiers égyptologues trouvent à Tanis de nombreux monuments au nom de Ramsès II, ils sont persuadés que c’est Pi-Ramsès. C’est seulement au milieu du XXe siècle que l’erreur sera corrigée.
Une communauté d’artistes vivait dans une fondation royale située sur la rive ouest de la ville de Thèbes, entre la Vallée des Rois et la Vallée des Reines. Leur activité principale était tournée vers la fabrication et l’ornement des tombes du roi et des membres de sa famille. Ces gens étaient de vrais artistes, fiers de leur savoir, qui signaient régulièrement leurs œuvres.
Quelques témoins de leur savoir-faire et de leur mode de vie sont présentés dans trois vitrines : de grands éclats de calcaire portant l’esquisse d’un roi ramesside (Audio 10), un jeu de senet, un de ces artistes présentant des offrandes à une de leur divinité incarnée par une gazelle, un lion coursé par un carnassier, un tissu orné d’un autoportrait du peintre Sennéfer.
Ensuite, le visiteur découvre la tombe du peintre Sennédjem en activité sous le règne de Séthy Ier et au début de celui de Ramsès II. Ses parois sont présentées sous forme éclatée à l’aide de photographies agrandies et rétro-éclairées. Un film (Audio 11) dévoile la tombe complète. Un autre film expose le décor extraordinaire de la tombe de la grande épouse royale Néfertary, œuvre de la communauté à laquelle Sennédjem appartenait. Au centre de cette salle, trône le cercueil extérieur de Sennédjem couvert d’extraits du « Livre des Morts » accompagnés de vignettes peintes avec une dextérité extraordinaire.
La tombe de Ramsès II se trouve dans la Vallée des Rois (KV7). Malheureusement son emplacement a été mal choisi, car lors des orages, rares mais violents, les eaux pluviales se concentrent à cet endroit et dévalent dans la tombe. De plus, sa notoriété a causé son malheur. En effet, son mobilier funéraire sera entièrement pillé à la fin du Nouvel Empire et nous n’avons aucun de ses trésors à montrer dans l’exposition.
Le Nouvel Empire (1550-1069 avant J.-C.) est une notion inventée par les égyptologues au cours du XIXe siècle. Cette dénomination repose sur des constatations historiques, mais les rois qui ont succédé aux Ramessides se considéraient comme leurs successeurs et n’ont pas imaginé qu’ils vivaient la rupture chronologique (Nouvel Empire / Troisième Période intermédiaire) énoncée par les historiens actuels. Ainsi, lorsqu’Amenémopé est monté sur le trône, il a pris un nom de couronnement semblable à celui de Ramsès, se présentant de fait comme un continuateur de l’œuvre de l’ancien roi, témoignant ainsi de l’importance de sa renommée pour la postérité. Donc, en toute logique, dans l’exposition, le masque funéraire doré d’Amenémopé peut jouer le rôle de celui de Ramsès. Ce masque est orné d’un cobra dressé, l’uræus, déesse qui protège magiquement le roi. Dans la même vitrine se trouve une autre uræus, de mille ans plus ancienne que le masque d’Amenémopé, datant de l’époque de Sésostris II. Cela témoigne de l’unité de la nature royale au cours des temps.
Pour la postérité, le règne de Ramsès correspond à un « âge d’or », or, dans la mémoire égyptienne, un premier âge d’or avait existé, correspondant à ce que nous désignons comme le Moyen Empire, l’époque des Sésostris. Ces deux périodes fastueuses se sont confondues dans l’imaginaire égyptien. Les rois Ramsès et Sésostris se sont fondus en un seul personnage archétype : le pharaon parfait, le grand conquérant. Le temps passant ses hauts faits ont pris toujours plus d’importance. Son souvenir magnifié a été transmis par les auteurs antiques grecs et latins. Au siècle des « Lumières », on lui a même prêté l’invasion et la colonisation de la Chine, supposant qu’il avait enseigné l’écriture aux Chinois… Il a fallu attendre le déchiffrement des hiéroglyphes par Champollion pour pouvoir rétablir la vérité.
Donc, après sa mort, le trésor funéraire de Ramsès est perdu et il est devenu le roi mythique Sésostris. C’est la raison pour laquelle la salle suivante montre des bijoux du Moyen Empire, l’époque des rois Sésostris. Ils témoignent de la dextérité inégalée des orfèvres cette époque : les colliers et ceintures, tels ceux de Néférouptah et de Mérit. (Audio 12), l’incroyable poignard de la reine Ita, et le bandeau royal en or massif, mis en parallèle avec le relief des princesses du site d’El-Bercheh (Audio 13).
Bien entendu, il est inconcevable de présenter la momie de Ramsès II, ni de faire venir d’Égypte aucune autre momie humaine. Des momies d’animaux découvertes en 2018 dans la zone du Boubasteion de Saqqara (Audio 14 et 15) permettent d’évoquer la momification, même si elles datent de l’époque ptolémaïque. En effet, cette pratique qui consiste à momifier des animaux pour en faire des offrandes déposées pour demander une grâce à une divinité, est postérieure au Nouvel Empire.
Pour évoquer la richesse du mobilier funéraire perdu de Ramsès II, nous présentons ceux de la nécropole royale de Tanis découverts par Pierre Montet au moment où éclatait la Seconde Guerre mondiale. Ces rois de la Troisième Période intermédiaire se considéraient comme héritiers du grand Ramsès, d’autant plus que leur capitale, Tanis, la Thèbes du nord, avait été érigée en remployant les monuments de Pi-Ramsès.
Quelques pièces exceptionnelles signifient que si l’Égypte n’a plus la puissance du Nouvel Empire, elle est encore en état d’exhiber des richesses inégalées. Ainsi, nous présentons de magnifiques coupes en argent et en or, ainsi que des bijoux d’or, un pectoral scarabée de cœur et le grand collier-chébiou de Psousennès pesant plus de 8 kg (Audio 16). Il faut ajouter le collier et le magnifique masque en or massif du général Oundjébaouendjed, enterré à côté du roi Psousennès pour des raisons que nous ignorons.
La salle suivante présente, pour la première fois hors d’Égypte, l’ensemble des enveloppes qui protégeaient le corps d’un roi, emboitées à la manière des poupées russes.
Dans une première vitrine au fond de la salle, se trouvent les éléments placés au plus près de la dépouille royale : plaque en or, ornée d’un œil-oudjat, protégeant l’incision pratiquée du côté gauche de l’abdomen pour enlever les viscères embaumés à part ; masque en or ; doigtiers en or couvrant les doigts et les orteils ; divers colliers, bracelets, etc. en matériaux précieux ; armature en or qui maintenait un pagne à devanteau ; sandales en or.
À droite, une deuxième vitrine murale présente le cercueil de Chéchonq II, en cartonnage plaqué d’or et de matériaux précieux dans lequel était placée la momie royale. Il est à tête de faucon, idéogramme hiéroglyphique signifiant « dieu ».
Dans la vitrine centrale (Audio 17) se trouve le couvercle de sarcophage en argent de Chéchonq II à tête de faucon, dans lequel était placé le cercueil en cartonnage. Il est accompagné de quatre petits sarcophages d’argent qui contenaient les viscères royaux.
L’ensemble était placé dans un sarcophage en pierre. Il est matérialisé ici par le couvercle du sarcophage de Psousennès, en granite rose. (Audio 18). La face extérieure présente en haut relief, gisant, Osiris momiforme, bras croisés, tenant les emblèmes royaux : le sceptre-âout et le fouet-nékhakha. Derrière sa tête, Nephthys, agenouillée, le protège. Aux deux extrémités sont gravés des milans. Il s’agit des déesses Isis et Nephthys. La face interne présente en haut-relief la déesse du ciel, Nout, couverte d’étoiles. Elle est entourée de divinités dans des barques, représentant les corps célestes. Le roi mort est Osiris, Nout l’avale le soir. À la fin de son périple nocturne, le roi est mis au monde par Nout. Il apparaît au matin en soleil levant. Un nouvel Horus, son successeur, est monté sur le trône et le cycle du monde continue.
Le couvercle du sarcophage de Psousennès est un remploi. Il appartenait à l’origine au roi Meryenptah, successeur de Ramsès II. Pour le récupérer, il a fallu que Psousennès envoie une équipe de spécialistes dans la Vallée des Rois. Ils ont dû descendre au fond de la tombe KV 8, où se trouvaient quatre sarcophages de pierre emboités, dégager ce lourd couvercle, le placer sur un traineau, le remonter jusqu’à la sortie, lui faire traverser la Vallée des Rois et la rive ouest de Thèbes jusqu’à un bateau qui le transporte à Tanis pour le placer dans le caveau de Psousennès. Il eut été plus simple d’en extraire un neuf et le rapporter directement des carrières d’Assouan. Ce remploi est donc un message politique présentant Psousennès comme successeur de Ramsès. À cette époque, il est impossible de rapporter le couvercle du sarcophage en pierre de Ramsès car ce dernier a été fracassé par les pilleurs dans les années 1090 avant J.-C.
Ce monument permet de finir notre histoire. En effet, le périple de Ramsès est fini. Il est transfiguré au sein du cycle solaire. Son fils Méryenptah, représenté à l’exposition par son buste en pierre, est monté sur le trône. Un nouveau règne commence.
Cependant, il reste un épilogue à raconter, les aventures rocambolesques de la dépouille de Ramsès II. En 1881, Émile Brugsch découvre stupéfait une cinquantaine de momies royales du Nouvel Empire entassées avec celles de membres de la famille des grands prêtres d’Amon de la XXIe dynastie dans une cachette située dans la falaise de Deir el-Bahari (TT 320) sur la rive ouest de Thèbes. C’est le résultat d’une longue enquête déclenchée par le service des antiquités de l’Égypte lorsque des objets funéraires royaux de provenance inconnue ont été vus sur le marché de l’art. Ils proviennent du pillage de cette cachette découverte par un jeune chevrier de la famille ‘Abd el-Rassoul. L’équipe dirigée par Émile Brugsch emporte les dépouilles pharaoniques et le mobilier qui les accompagne, pour les faire transporter en bateau jusqu’au musée de Boulaq. Sur tout le trajet, la population acclame ses anciens rois retrouvés. C’est ce qui sera rejoué en 2021 lors du déplacement des momies royales depuis le musée égyptien de la place el-Tahrir jusqu’au musée national de la civilisation égyptienne où elles sont présentées aujourd’hui. Les cercueils du premier prophète d’Amon Pinédjem II et de la dame Nésykhonsou, son épouse, témoignent de cette découverte.
À la fin du règne de Ramsès III, en raison d’une conjonction internationale problématique, l’Égypte est en proie à une grave crise économique. Elle cause une grève des membres de la communauté de Deir el-Médineh qui réclament leurs salaires impayés. La tombe de Ramsès II est victime d’une première tentative de pillage. Vers 1090 avant J.-C., à la fin de la XXe dynastie, sous Ramsès XI, le sarcophage de pierre de Ramsès II est fracassé, les trésors funéraires du roi sont volés. La police de la nécropole alerte le clergé d’Amon dirigé par le premier prophète Hérihor. On décide de transférer Ramsès dans un magnifique cercueil momiforme en bois de cèdre qui n’avait jamais servi, au style caractéristique de la période entre la fin de la XVIIIe dynastie et le début de la XIXe dynastie. Le roi dans son nouveau cercueil est mis en sécurité dans le tombeau de son père Séthy Ier. Les responsables du sauvetage ont inscrit à l’encre noire, sur son abdomen les noms du roi dans deux cartouches, et derrière sa tête un compte-rendu des évènements. Ce monument emblématique est présenté dans une vitrine placée au centre d’une salle reproduisant une partie du tombeau de Séthy Ier. L’Égypte l’a prêté exclusivement à la France en souvenir du sauvetage de la momie de Ramsès II en 1977. Après des millénaires, le bois exhale toujours un parfum très puissant.
Sous le règne de Siamon, vers 970 avant J.-C., lors d’une nouvelle grave crise économique, les tombes thébaines sont pillées en masse. Le clergé d’Amon décide se monter une opération de sauvetage et demande conseil à la déesse Mout par le biais de l’oracle. Suivant ses directives, on cache tout ce qui peut être sauvé dans la tombe de la reine Inhapy, invisible dans une anfractuosité de la falaise de Deir el-Bahari. Cette dernière péripétie est inscrite à l’encre noire sur les jambes du cercueil de Ramsès II présenté à l’exposition. Ces momies y ont reposé dans une quiétude de 2800 ans jusqu’à ce qu’un jeune chevrier les découvre.
L’exposition se termine sur la magnifique statue de Ramsès II en calcaire découverte en 1930 à Hermopolis, la ville de Thot, dieu de l’écriture et de la représentation d’images. Elle est accompagnée d’une vidéo de 4 minutes qui fait le point sur la légende de Ramsès jusqu’à aujourd’hui.
Par Dominique Farout et Bénédicte Lhoyer, commissaires de l’exposition Ramsès & l’Or des Pharaons.